Je bois un café, dans le café de la gare. Les gens s'activent. Qu'ils aillent se faire foutre. Je me demande si ce sera toi qui ramassera le mot. J'en sais rien. De toute façon, toi ou un autre, j'en ai rien à foutre, j'ai juste envie... Envie.
L'immobilisme sexuel me ronge. Les gens ne s'accrochent pas dans mon paysage, tractant leur vie, la poussant parfois sur des chariots. Ils ne s'arrêtent pas, ils sont sur leurs rails aussi. J'ai envie de leur dire que j'existe. J'aimerais que ce soit toi qui ais ce mot. J'aimerais attirer l'attention, je ne peux rien faire, bloqué entre mon noisette de 8h et mon espresso de 10h. Je m'en fous si c'est toi ou un autre. J'ai juste envie de quelque chose de fort, et de doux. Le genre de chose que l'on n'avoue pas ensuite. Tu sais, des mots un peu vulgaire à susurrer dans l'oreille. L'amour aveugle, puisque à l'aveuglette. J'ai envie de te sentir, sentir tes mains. Je suis vide de t'attendre, je ne sais pas qui tu es. Les espresso sont trop court, me coupent le sommeil, me donnent envie, des envies.
Allez quoi, ramasse ce mot, appelle moi. Je t'attends.

Je traine.

Knackered shoes

25/01/2010 (18:55)

http://forever-ago.cowblog.fr/images/IMG01112.jpgMaman,

Dehors, il fait beau. Tu m'as toujours dit de pointer le nez dehors quand il fait beau. Que je reste un peu trop souvent enfermé, entouré de choses ; de livres, de films, et d'autres trucs qui te dépassent. Avec le temps, j'ai commencé à apprendre à apprécier l'air qui caresse le visage, et le vent frais qui fait que la mer est belle car pleine de cette mousse blanche qu'est l'écume.
Dehors, il fait beau. Le printemps semble encore frais, resplendissant. La douceur des jours est un peu la même que le velours de ta robe de soirée que tu as mise pour mon 18ème anniversaire. Il y a les oiseaux le matin, je les entends à la fenêtre. Bientôt l'été fatigant, mais pour le moment, le printemps.
J'écoutais de la musique ce matin, tu sais, toujours un peu la même. Des choses sans trop de profondeur, mais bon, ça me plait bien. Et puis j'ouvrais les yeux, et les volets, enfin, oui, dehors, il fait beau. La chanson a fini par s'achever, puis le CD, et je suis resté un peu là, à contempler le silence, écouter le soleil qui baignait la chambre et le quartier. Les mots accrochent un peu, et ne glissent pas. C'est le papier, le stylo, j'en sais rien ; ça accroche.
Je me demande, la table de la salle à manger ou la table basse du salon ? Il n'y a pas trop d'endroit pour annoncer ce genre de choses. Ce serait lâche de laisser ça en plan sur mon bureau. Il est 13h45, j'ai mangé des pâtes, il n'y a plus rien dans le frigo.
Damien a appelé, il voulait savoir s'il pouvait passé manger demain soir, j'ai dit que j'en savais rien, et puis il a dit qu'il rappèlerait ce soir. Moi en raccrochant, j'ai vu qu'il faisait toujours beau dehors, et que c'est comme ça, on n'y peut rien.
En partant, je laisserai les clefs dans la boîte au lettre, histoire que je les perde pas en route. Tu pourras guetter mon retour ; juste un peu. Promis, je ne serais pas long : il fait si beau dehors. Un mois, peut-être deux. Je crois qu'il me le faut le temps que j'avance, que je mette ma vie de côté. Deux mois de marche, tu crois que je ferais taire tout ces bruits la nuit, ça ne me berce pas, ça ne me hante pas. C'est juste bruyant. Je sais tu ne comprends pas, pas très bien, et je me mets à ta place et je serais que je ne comprendrais pas aussi. Mais il me faut ça ; il faut aussi que tu essayes de le comprendre.
Ne t'inquiète pas — et Dieu, je sais que cette phrase est ridicule. Mais, ne t'inquiète pas, j'ai de l'argent, et puis, pour le reste je t'écrirais.
Ne te tracasse pas trop avec tout ça.  Ce n'est pas ta faute, au contraire. Mais il fait beau dehors, aujourd'hui, je n'ai qu'une chemise. J'ai mis mon jean tout troué même si je sais que tu dois faire les gros yeux en te disant que c'est pas une tenu. Je t'assure, tout le monde a toujours trouvé que j'étais un type bien, trou dans le jean ou pas.
Enfin, si il fait beau encore ce week end, profites-en. Va faire un tour sur la côte bleu ; à Méjean ou je ne sais pas. Prends une glace en terrasse à Carry. Ne pense pas trop à moi, j'ai besoin.

Je t'embrasse, je t'aime.
A très vite,

 
Ton fils.

Garçon, l'addition.

24/01/2010 (17:02)

http://forever-ago.cowblog.fr/images/Espresso.jpgMademoiselle,

Il paraît que dans ce café on vous appelle Hiver. Moi, je ne suis pas du genre à me démonter, mais quand même Hiver ça en jette. Je sais que j'aurais les mains tremblantes quand j'aurais fini ma lettre, peut-être le froid, hein, c'est ce qui faut dire : "c'est le froid". Les copains, ils me croient pas quand je parle de vous, c'est parce qu'ils ne vous ont pas vu. De toute façon ils sont un peu bêtes mais ce sont mes copains alors je peux pas dire grand chose.
Toujours est-il que je dois vous le dire, vous l'écrire, mademoiselle vous m'avez charmé. Maintenant je pense à vous quand je rentre chez moi après le service. C'est moi qui vous ai servi votre noisette l'autre jour. Et depuis, j'ai la tête ailleurs, que même que le patron il est pas content. Mais ça va, je me recentre. Enfin, j'essaye, il faut bien. Moi je crois pas que votre prénom ce soit Hiver. C'est pas possible. Et puis, vous avez dit un "merci" très doux quand je vous ai servi, alors, ce n'est pas vrai que vous vous appelez Hiver. Peut-être les yeux bleus qui donnent froid.
Je dis tout ça parce que, de vous, je suis un peu fou. C'était pour savoir, si vous voudriez bien, enfin vous savez que l'on sorte un jour. Je pourrais vous inviter au cinéma, en face, ils jouent de très bons films, et puis l'ouvreur c'est un copain sûr qu'il nous accueillera comme le président des Etats-Unis, ou peut-être de plus loin encore.
Pour la réponse, vous n'avez qu'à me le dire sur ce papier. Ou je ne sais pas.
Votre serveur,

 
//
PS : j'ai les mains qui tremblent un peu.

Point d'équilibre.

23/01/2010 (0:02)

8 Août
Elise,

La vieille d'à côté est morte. Je suis pas sûr que sa famille ait acheté un cercueil — Tu crois qu'ils l'ont brûlée ? Ils ont tout mis dans des boîtes en cartons, tout expédié quelque part ; dans une déchetterie sans doute. J'y ai pas cru sur le coup. paraît qu'elle était malade, mais quand même, enfin, tu sais comme c'est, on l'a toujours connue, même si elle était chiante, qu'elle nous espionnait, elle faisait partit du décor.
La rue est vide depuis. L'été est épuisant, une chaleur à s'en frapper la tête contre les murs. Je dors presque autant qu'un chat et les douches glaciales ne font rien. La vieille d'à côté est morte, rien ne se passe. La seule animation c'est le mistral, impossible d'aller à la mer. Puis si c'est pour voir tous ces gens qui brûlent au soleil, non merci. Tout le monde s'est barré ailleurs, moi je reste, il n'y a rien à faire. L'autre jour, j'étais déjà en nage pour aller juste jusqu'au bus. La clim était en panne, tu t'en doutes bien, le 35 n'a jamais été luxueux, ce n'est pas ton absence qui le rendra plus accueillant. C'était bondé de gens en maillots à fleurs roses avec casquette, tongs, serviettes, parasol, la totale (un peu ridicule si tu veux mon avis). Moi j'avais chaud, j'étais moite, j'en pouvais plus.
Je suis du regard le mouvement du ventilateur au plafond, torse nu, étendu sur le lit. j'attends que la nuit arrive, la nuit j'attends le jour — J'alterne les jours avec et sans sommeil. Le temps me semble plus long que d'habitude. Il n'y a plus personne à Marseille, c'est une ville fantôme avec des croisiéristes parlant italien la plupart du temps. Le genre à te bousculer dans le bus, dans les magasins. Tout le monde s'est barré sauf moi. Personne ne traine au Cours Ju, même les Punks semblent en vacance. La rue St Fé s'est débattue un temps avec les soldes, puis plus rien, juste le soleil et aucune ombre, et les relents d'air conditionnée si on rase bien les murs. Il n'y a personne pour sortir ou presque. Je suis allé boire un coup sur le port avec un ami, mais lui n'était pas dans une grande joie. La rengaine habituelle, sa copine s'est barrée, avec un gars qui est con — pourquoi ? question apparemment sans intérêt : il est con c'est tout —, ça a tourné court, et le lendemain il décollait direction l'Irlande.
J'ai l'impression d'être la femme qui attend en bout de quai, celle qui attend le mari en mer. C'est complétement saugrenu. La vieille d'à côté est morte, putain. J'ai 18 ans, et je suis collé là, à tourner entre trois pièces, sans amis parce que je suis trop caractériel, et que ceux qui s'accrochent vaille que vaille sont à l'autre bout d'un monde qui pourtant est étroit. Peut-être que si je tends la main... Mais, tous les deux on sait : je ne tendrai rien du tout ; je vais rester là, à attendre que quelque chose se passe. Je compte, cela fait 3 mois et 17 jours que t'es partie. Tu me manques.
La vieille d'à côté est morte, j'ai pris une cuite au rhum cette nuit, seul avec mon cafard, j'ai mal à la tête et je somnole avec un ventilateur qui fait le bruit d'un réacteur au dessus de ma tête.

Je t'aime,

//

Farewell

21/01/2010 (21:45)

Toi,

Hier il faisait gris, aujourd'hui le soleil le vent. Tu sais, ça balaye la mer, cela fait un coup de propre, il y a de la houle. J'aimerais être sur l'eau à cet instant. J'ai vu du monde aujourd'hui. Des gens que tu ne connais pas, parce que tu n'as pas voulu les connaître ; mes amis. Je compte les jours depuis que tu m'as dit que de toute façon ça nous mènerais à rien tout ça. J'ai perdu le fil, je crois que je m'accroche trop — tout à fait ancré, je ne rentre jamais au port. Je ne sais plus quoi écrire en introduction, et mes conclusions sont pitoyables, parce que j'y arrive à te haïr alors qu'on le sait toi et moi, que c'est le contraire.
Hier il pleuvait, mais tu le sais, tu étais là sous ce ciel. Je me demande si tu dansais, je ne sais pas, à chaque fois que je t'imagine ces derniers temps tu danses. Je ne pleure plus, c'est une nette amélioration. Je sais que tu ne lis pas les lettres, mais je les écris quand même, ça me détend, ça m'occupe dans le bus. Souvent les gens me regardent étrangement, puis ils se font à l'idée, il y a encore des gens qui écrivent des lettres.
Je n'ai bientôt plus d'encre,

Au revo


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